Ô RONDS-POINTS !

Vous étiez la laideur des provinces de France,
Boutons sur quoi l’on bute au milieu de l’errance,
Couronnes de goudron, écrins d’un édicule
Parachevant le laid d’un charme ridicule ;
Vous coûtiez cher pour être là ! Couchés,
Sans vie, sans intérêt autre que réguler
La vie qui se promène, afin que ça circule.

Vous voilà à la proue, piliers sacrés du chœur !
Et debout de partout vous ouvrez votre cœur !
Ô Ronds-points palpitants ! Cabanes ! Saintes Îles
Hors du flot du trafic qui vous klaxonne ! – Asiles !
Basiliques d’un peuple en lutte solidaire,
Vous êtes le péage où mettent pied à terre
Les bourgeois persifleurs et leurs gardes mobiles.

Français de souche et d’expansion, Ô Giratoire !
Tu avais dans ton coin honte de ton histoire.
Jaune comme l’étoile et comme le Soleil,
Tu brillas ! sacrifiant et ton temps et ta paye
Pour crever cette honte injuste et mercenaire !
Et tu marchas d’un pas de révolutionnaire
Jusqu’à Paris, qui te punit et te surveille…

Jusqu’à Paris, Enfants de la Place Étoilée !
Pour faire front. Déçus, furieux et mutilés,
Vous alliez en chantant sous la boue et les balles,
Saturnales gazées par un procès verbal !
Ô Saccage ! Et pourtant, protégeant l’Inconnu,
Vous teniez bons, prostrés, sous leur pluie soutenue,
Triomphant en soldats de l’ignoble cabale !

Vous étiez la laideur des provinces de France,
Et vous voilà porteurs affranchis d’espérance !
Bâtissant de tout bois toute une féerie
Dont le foyer mouline au grand vent de l’esprit !
Hercules de campagne aux mains avec Cassandre !
Déployant, jaune et fier, le maillot des méandres,
Vous défendez la zone et vous défiez Paris !