AU BEAU GESTE

Il remarque en rentrant que ce livre a bougé.
Il le remet debout, c’est mieux. C’est rangé.

Elle touche du bois et le taille en bateau.
C’est fait avec amour. Tiens mon fils, c’est cadeau.

Je parle juste et ce n’est pas pour ne rien dire,
J’essaie au moins, en le disant, de l’agrandir.

*

Celui qui de sa main souhaite faire le beau
Est pour moi un héros dans un genre nouveau.
C’est le dandy du pauvre, aussi propre qu’un Dieu,
C’est la belle âme honnête, autant que ça se peut .

Vivre en aménageant le monde qu’on habite,
C’est poursuivre la vie du sens dont on hérite !
Car l’homme heureux agit bien mieux que l’homme aigri :
Il transforme et transmet la beauté, sans son prix.

– J’ai déjà de mes yeux vu le geste d’un dieu.
Hommage aux arrangeurs du monde de nos yeux !
Toi par qui notre espace est soudain embelli,
Tu prépares du rêve extravagant le lit !

Petits noyaux de fruit défendus face aux vers,
Je vous offre – écrivant médiocrement ceci,
Entre un lit à border et une galaxie
De mobiles à faire, – un bouquet de bons vers !

Artisan qui fignole avec soin son ouvrage
Et épris de bien faire illumine d’un Graal !
Indigné défendant l’idéal du courage :
Contre la force brute, une force morale !

Consommateur faisant entre deux choix le sage
Pour que cet atelier supplante leur hangar !
Travailleur appliqué malgré l’odieux chantage
De ton talent ! Vous tous, Parents dans la bagarre,

Vivants pour vivre ! Enfin ! Le saint labeur humain !
Celui qui lie l’esprit à ce que fait la main !
Les pauvres conjugués en élan populaire
Par la force des bras font la parole et l’air !