D’HOMME À HOMME

C’est un père qui parle au président Macron.

A ce qu’on dit de moi, je suis bon professeur :
Assieds-toi sur ton cul et apprends-moi par cœur.
Je vais sans rire t’expliquer, c’est mon métier,
La vie, en vers réglés par Monsieur Sabatier.

Je te tutoie mais sans mépris. C’est politique.
C’est pour te rappeler, Macron, de toucher terre.
Je suis ce rien qui cause avec l’accent caustique :
Réglons ça d’homme à homme, ici-bas, Jupiter !

C’est un peuple nombreux qui rumine ta fin,
Monsieur le bombardé Président des Français.
Je te le rime en parisien parfait : défunt
Macron. Viré. Finie, la période d’essai.

C’est un père qui parle au président Macron
Dans un raffinement de plume et de goudron.

Emmanuel, mon pauvre, en l’état ennemi
De tout ce que je souhaite à mon fils insoumis,
À mes vieux qui s’en vont et à ma femme libre :
Soigne-toi. Sois meilleur. Éprouve, et lis des livres !

Je t’en prie, c’est sérieux d’être chef de l’État.
Fais tes humanités et relis ton contrat.
Échu à cette place où l’acte est conséquent
Tu bavardes, singeant, comme un communicant ?

Mais quand diable as-tu cru ? par quelle volonté ?
Manquais-tu donc d’esprit ? de choix ? de liberté ?
Pourquoi diable être allé prendre d’assaut le trône ?
Pour régner sur un mur rempli d’émoticônes ?

Était-ce pour la gloire ? ou par jeu ? pour le titre ?
Tu étais convaincu d’avoir voix au chapitre,
Tu te croyais brillant ? Mon dieu, c’est tous les mêmes !
C’était pour le plaisir, cette ânerie suprême ?

Observant l’autre con le faire tout pataud,
Tu t’es dit : après tout, je ne suis pas plus sot.
C’est toi qui veux vraiment ou c’est eux qui te poussent ?
Faut-il sauver ton âme, aller à ta rescousse ?

Prends un moment. Regarde-toi dans une glace.
Tu sais combien sont interdits d’être à ta place ?
Tu sais combien ont caressé – avec dégoût –
L’idée d’en être, et ont dit non, restant debout.

Nous te prêtons le droit de dispenser tes foudres
Mais tout chez toi trahit ; partout, ça sent la poudre :
Perlimpinpin, salaud, fumier d’illusionniste !
Je t’inscris en premier – et en gras – sur ma liste.

C’est un père qui parle au président Macron
Dans un raffinement de plume et de goudron.

Fasciste libéral, monarque des poulets,
L’effigie de ta race est brûlée au gibet,
Et toi coulant comme un serpent à la télé :
Pour qui se prennent-ils, avec leurs grands gilets !

Même si Macron le veut pas, nous on est là !
C’est ta chanson, pour supporter ton quinquennat.
Tu pompes notre sang pour tous tes fins de race
Mais c’est pour nous, cochon, que tu vas rendre grâce !

On te pendra, lanterne, avec la paille au cul.
On te foutra le feu pour que ça pète un peu.
C’est comme ça, l’Histoire : on prend, quand on peut plus
La tête entre les mains – et on la casse en deux.

Nous on a des enfants, on se soucie d’après ;
On réclame de l’eau, de l’air pur, des forêts –
Et ta tête, Macron. Je le dis d’un sourire
En la regardant choir, rouler, aller mourir.

Ton portrait n’était rien qu’un peu d’échauffement.
Il est temps d’être tué froidement, pour l’exemple. […]
Mais le peuple offensé est bien brave et, clément :
Te traduire en Justice et les chasser du Temple.

C’est un père qui parle au printemps dans un livre.

Un nid, des envolées : tout le bonheur est là.
J’avais tout arrêté, même écrire pour vivre
Heureux, tout en luttant de mes grands petits bras.
C’est plus de joie jamais que le dira un livre.

On en a gros ! Et les gros bras du grand poète
S’ouvrent parfois comme des ailes de faucon
Pour fondre sur son roi, proie de nature en fête :
J’ai de la plume et du goudron pour tes chansons.

Ces châtiments légers, signé d’un hugolâtre,
T’annoncent que le vrai se prépare à tomber :
Tu rejoueras tantôt la fin de Cléopâtre,
Et nous applaudirons en spectateurs comblés.

Je retourne au silence après avoir parlé.
Je ne dispute pas ton titre ou ta fonction,
Je ne suis pas ici pour faire pourparlers :
Je jette un livre au vent et je rejoins l’action.

Je suis chauffé d’un autre bois. Et au foyer,
Dont je défends toute l’échelle du bon sens,
Je nourris le génie de ma force employée
A rendre au plus serré exaltée l’existence !

Il faut défendre de pied ferme, et faire un pas :
A ceux qui font la vie qui va et réfléchit !
Contre les Loups aux chats perchés du « ça ira »,
J’enseigne l’empathie, l’amour et l’anarchie.

Ni paradis ni rien, même pas pour la gloire,
C’est faire le plus simple et le faire en chantant,
Comme s’écoule vive et sans châteaux la Loire,
Dans la continuité des méandres d’antan.

C’est un père qui parle à Macron, dans un livre
Où il donne leçon de ce que c’est de vivre.

Nous faisons des métiers semblables tous les deux :
Pour moi professeur, père – et toi, président-roi.
Nous orientons, puisqu’on est vu comme des dieux ;
C’est donc à nous de nous hisser jusqu’à leur foi !

C’est prendre le caillou, en faire tout un feu,
Le mettre dans leurs yeux et le laisser qui vibre :
C’est les faire plus forts en les rendant heureux,
Et les rendre plus beaux en les faisant plus libres.

Je te parle parfois, toi l’Épiphénomène,
Mais c’est à eux que je m’adresse tendrement.
Je parle à la fierté de la nature humaine,
Au sang qui vient et nous trahit heureusement !

C’est un père qui parle au printemps, dans un livre
Où il donne leçon de ce que c’est de vivre.

Printemps ! Je te défie comme on supplie un fils
D’éclore du cadavre acharné de mon temps :
Va recueillir nos chants et notre sacrifice,
Et de notre baleine enfante un Océan !

La colère rentrée de ma main, cependant,
Forme un poing préparé pour ta gueule, Printemps,
Si tu tardes encore à t’ouvrir, récitant
De fines fleurs tout seul dans ton coin dissident.

Chaque génération des luttes a la sienne :
Tiens-toi droit, Floréal, fais honneur aux anciennes !
Laisse-moi être en Terre et naître à répéter :
Printemps, été, automne, hiver – avec gaieté !