Galerie d’art morbide où reposent mes Dieux.
C’est un effort à faire : il faut leur dire adieu.
Tout en nous est mortel et nous allons, vivants,
Raviver et souffler la flamme de leur vent !
Phares sans feu ! Éclaireurs d’art ! ah mes Poëtes !
Joueurs, qui font des pieds de nez au temps, trompettes !
Du vent ! Du balai le Beau ! Du balai le Laid !
Bêler comme des veaux, c’est beau ! Serpents ! Sornettes !
J’en suis ! Puisque avec vous, la vie n’en finit pas !
Entre ici, Troubadour ! Inaugure ma liste.
Clerc obscur et artiste éclairant, sans son chic
Tenant – par le bon bout ! le fil avant-gardiste,
Il faisait de tout bois des laisses héroïques !
L’heure était aux champions et au charme des gueux !
Il faut goûter cette chanson ! C’est clair, c’est peu.
C’est de la vie, jusqu’à la peste, au temps des rats.
L’abondance, en retour, engraisse un beau parleur :
L’heure est aux grammairiens, savants et carreleurs.
Marot aura des mots mais la phrase l’écrase :
La virgule ceinture, étrique et patatras.
La langue bien bâtie donna ses bateleurs :
Ronsard et du Bellay ! Défense et droits d’auteur.
Ils ont la pique assez pointue ! Lyrique ! Épique !
Passionnés par le gros barbelé, et la graisse
Antique de leurs fers, ils paraphent leurs bœufs !
Cela beugle si bien qu’on rame assez, après.
C’est le Saint Excrément : on faisait gras, Monsieur.
En parlant de Monsieur, voici Louis XIV !
Son Siècle, comme on dit, ne manque pas de force :
Garantir ? Arnold ? Martin ? Legrand ? Le Brun ?
La langue est raffinée et c’est les grosses huiles !
Gloire, quel bâtiment ! Il écarte les eaux !
Marcher dessus ? Folie ! Du plat, aplat, des pieds !
Mathématiques, c’est d’abord un art plastique !
Molière a du déni et Corneille était trop ;
Racine est mort, feuille tombée hors de saison.
Montaigne au bout relaie ! Pascal avait raison !
La Fontaine était sûre et la source était bonne !
C’est l’heure au caractère accompli du français !
La loi, le roi, ma foi ! Dieu que ça se dispute !
Langue de bœuf fouillie vite devenue pute !
Voltaire à terre avec son sceau rouspète un coup –
C’est du sérieux, rieux ou non et puis ainsi…
Révolution ! Tannée ! – puisqu’on aura ta peau !
Oripeaux ! Les cochons grognent toujours plus haut !
Dans la boue, embourbés tout debout comme un autre
Les Cygnes au long cou roucoulaient par couplets :
C’est Chénier, c’est Vigny, Lamartine et Musset ;
C’est la langue de l’eau, majestueuse et froide.
Paroles… mais moi, moi ! Parole, moi j’agis.
Hue à gogo ! Hue-da ! Des gros sabots ! Victoire !
L’Homme-Langue-Française a donné l’étalon
Imbattu, imbattable, en vers et en ivoire,
Victor Hugo, l’homme au poème fleuve et beau.
Un petit monstre admiratif était en feu
Et fumait d’impatience en se frottant les yeux.
C’est de l’air contre Hugo : l’Avide et le Goliath !
C’est Beau ! De l’air ! De l’air ! Ta poésie spartiate
Fait étouffer en bas ! Enfer ! Boire la lie
De poésie profonde et odorante – égout
Du meilleur goût ! Bravo, le frisson a du bon !
Descendu de ta race, un peuple mort – de bides
En bides ! par le bas, par la tare, Ô Caïds !
Deux siècles qu’on nous tanne à l’art raté :
L’élévation de puce et l’audace d’autruche.
Et on s’étonne que l’on baisse ? allons !
Douleur mise en sagesse et autres fleurs parfaites
Fit des petits, boutons et pustules surfaites !
Va, Maori génial, tes poteaux de couleur
Chantent fort faux ! Mais quel pus ! quelle bile !
Cela sent son cadavre et son agraire aigri.
Male horror ! Hysteria ! Le miroir ne dit rien –
Parlons mieux ! Couchez-vous, il faut s’abandonner.
Vers blancs navrants d’idées larvés comme des poux.
L’œuvre sera échevelée et pleine comme
Une femme ! Oh certains, stériles et sublimes,
Miment encore un peu les anciennes étoiles.
Tendresse aux survivants. Nous faisons ce qu’on peut.
C’est dit – et non compris : très heureux de m’en battre !
C’était sur de la langue un beau pâté de sable
À la mode moderne. À mes contents pour rien !